Artistes, élus, diffuseurs, organisateurs : la cohérence est-elle possible ?
Dans la continuité des nombreux débats dont le festival s'est fait une spécialité (les Bretons et la politique, les Bretons et l'environnement, parler deux langues, l'avenir des fest-noz...), et s'associant pour ce débat aux deux festivals ( Daoulagad Breizh à Douarnenez, et Dre ar Wenojenn en Centre Bretagne), la parole sera donnée à tous ceux qui souhaitent que de nouvelles approches voient le jour.
Film, constats, mais aussi tables rondes avec :
- des élus du conseil régional, général (22 et 29),
de mairies de communes de différente taille
- des représentants de la danse, de l'audio-visuel, de la musique et
des arts plastiques, culture urbaine et culture traditionnelle
- des diffuseurs et des compagnies de théâtre
- des organisateurs
Au lieu de former des "ghettos" ou des corporations, quatre tables
rondes réuniront quatre meneurs de jeu (un artiste, un élu, un
organisateur, un diffuseur) autour des questions suivantes :
- la culture coûte cher ? Essayez l'ignorance.
- Dans un monde sans poésie, les rossignols se mettront à roter.
Cioran
- Fêtes gratuites et musiciens municipaux
- Princes et mendiants : la course aux subventions
La cohérence pourrait être possible entre artistes, élus et organisateurs
Samedi à l'amphithéâtre de Kerneuzec, 40 personnes se réunissaient pour réfléchir à la place de l'artiste et aux différentes questions que posent les fêtes gratuites, la signature du protocole début janvier et la nécessité de s'organiser, et surtout de s'écouter avant de tracer des voies nouvelles de collaboration.
Jean-Bernard Vighetti endossait les casquettes de maire de Peillac et d'organisateur du festival des Tombées de la nuit à Rennes pendant 23 ans. Voici ce qu'il a dit, lors de synthèse des groupes de travail..
Se battre contre la norme
C'est comme cela que la Bretagne s'est "mise
debout", grâce aux talents de chacun. La Lorraine, et de nombreuses
autres régions françaises ont tout perdu de leur culture d'origine.
Ici en Bretagne, ce combat contre la norme, l'uniformisation, permet l'éclosion
de talents, d'artistes dans beaucoup de domaines.
Tout d'abord, il faut revenir aux évolutions sociétales en manière
de culture : 43 heures d'audiovisuel ludique (télévision, jeux
vidéo, internet
), par semaine et par personne en France. Les "tuyaux"
sont alimentés par l'industrie culturelle des Etats Unis. En dix ans,
on a fait de nos enfants des hommes sandwichs qui, en plus, paient cher pour
être des hommes sandwichs. L'économie culturelle en France représente
2,2% du PNB, aux Etats-Unis 7% (depuis deux ans, elle a dépassé
les gains militaires).
Face à ce rouleau compresseur, il faut défendre la diversité et reposer l'enjeu de la culture : être des consommateurs passifs ou être différents les uns des autres. La politique culturelle est au centre de toutes les politiques, à tous les niveaux (local, cantonal, communautaire, départemental, régional ). Nos communautés rurales sont devenues des cités dortoirs et sont fragilisées, culture urbaine et culture rurale se mélangent et perdent leurs repères. Comment recréer cette communauté lors des temps libres ? Recréer un rythme calendaire avec des fêtes, des événements culturels ? Y associer les différents acteurs (associations, commerces, élus ) ?
Bâtir l'Europe sur un socle culturel est une priorité : qui de nous connaît des artistes européens ? Il faut redécouvrir l'artiste, la poésie, prendre des risques en essayant des formules nouvelles, jouer du théâtre dans les rues, sortir les artistes de leurs boîtes noires (scènes fermées, projecteurs ) et les confronter à la lumière du public.
Le champ culturel aujourd'hui est l'endroit où les collectivités ont le plus grand rôle à jouer pour donner du sens aux choses. L'artiste n'est pas une cerise sur le gâteau : il est au centre de l'économie. Un territoire où il ne se passe rien, où les gens ne se parlent pas, ne vivent pas des temps forts , perdra des habitants, verra son économie régresser. La Bretagne est un vivier énorme d'artistes, la musique bretonne foisonne, est multiforme, mais les diffuseurs n'ont pas conscience de cela. Des nouvelles formes de spectacles naissent dans la rue, dans les cités de caractère, autour du patrimoine
La Bretagne peut devenir la Californie de l'Europe, le Pays de Galles du Royaume Uni à condition que les coups répétés aux intermittents (signature du Protocole) cessent et que les artistes organisent mieux la profession, qu'ils sachent vendre et non seulement produire, et que les collectivités locales et les organisateurs s'entr'aident pour qu'au lieu de 60 lotos par an, certains pays puissent bénéficier d'animations de qualité pour tous, dans le respect du public et de l'artiste.